Sécurité et de la santé au travail. Une situation inquiétante

En cette Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, la FNATH souhait dénoncer une situation inquiétante.

Si l’Assurance Maladie – Risques professionnels, lorsqu’elle a publié les chiffres de la sinistralité 2019 adoptait une vision très positive de la situation, il serait bien imprudent de se glorifier d’une quelconque avancée dans ce domaine.

En effet, rappelons d’abord que si l’Assurance maladie se prévaut d’une sinistralité « en légère baisse » pour les accidents du travail en 2019, il faut regarder cette moyenne avec méfiance puisque, pour certains secteurs, c’est en réalité, une tendance très inquiétante qui se dessine. Ainsi, les accidents du travail augmentent dans les services, en particulier dans les activités tertiaires (administrations, banques, assurances…) avec une hausse de 4 %, mais aussi dans les secteurs du travail temporaire et de l’action sociale avec une hausse de 1,3 %.

Autre tendance inquiétante : le constat qui tient à une hausse du nombre d’accident du travail en 2019 (+0,6%).

Les milliers de travailleurs des plateformes (uber, Delivroo, ….) oubliés de la santé au travail

C’est, enfin, oublier un peu vite des milliers de travailleurs qui passent « sous les statistiques » puisqu’ils ne sont pas considérés comme des salariés (Ubérisation).

Une prétendue légère progression du nombre de maladies professionnelles

Quant à la prétendue légère progression du nombre de maladies professionnelles en 2019, il reste que l’on s’inscrit en réalité dans une tendance haussière et non pas vers une diminution (+ 1,7 %) et, ce, pour les maladies reconnues par le droit en vigueur.

Pour les autres maladies, celles qu’on ne veut pas reconnaître comme professionnelles, c’est bien un mensonge d’Etat organisé qui perdure.

Par exemple, le lien entre l’exposition professionnelle aux risques CMR (cancérigènes, mutagènes et neurotoxiques) et la reconnaissance de maladies professionnelles qui en sont la conséquence, reste encore très largement minoré. Ainsi, sur la période 2013-2017, l’Assurance Maladie a reconnu, en moyenne 1840 cancers d’origine professionnelle par an, soit 0,5 % des nouveaux cas de cancers recensés en France. Or, selon la dernière enquête Sumer de 2010, 10 % des salariés, soit 2,2 millions personnes, étaient exposées à au moins un produit CMR, les cancérigènes représentant 90 % de ces expositions. Parmi les salariés exposés, 30 % avaient eu au moins une double exposition.

De fait, le plan cancer 2014-2019 estimait la part des cancers attribuables à des expositions professionnelles entre 14 000 et 30 000 cas par an, bien loin des 1840 cas officiellement reconnus… !

Un système public de reconnaissance des maladies professionnelles complice de la sous-déclaration des maladies professionnelles.

C’est également un système public de reconnaissance des maladies professionnelles qui est totalement complice de la sous-déclaration des maladies professionnelles.

Ainsi, il aura fallu QUATRE années au ministère pour rédiger un décret portant sur la création d’un nouveau tableau de maladie professionnelle en 2021 (exposition au trichloréthylène) alors la Commission Spécialisée « maladie professionnelle », compétente en ce domaine, avait émis un avis favorable en Juillet 2017 !!!

Que dire du nouveau tableau de maladie professionnelles 100 « COVID » qui bien loin d’apporter une réponse aux salariés contaminés complique une procédure déjà difficile en y ajoutant des restrictions médicales et professionnelles.

Voir l’article d’A-Part-Entier sur ce sujet : RECONNAISSANCE DU COVID EN MALADIE PROFESSIONNELLE : FAIBLE

On comprend mieux ce chiffre ridicule de 1840 cas officiellement reconnus de cancers professionnels par an !

D’autre part, c’est sans honte mais avec un cynisme sans borne, que l’Etat aura laissé les victimes d’un cancer du rein consécutif à une exposition au trichloréthylène sans aucune indemnisation au titre de la législation des risques professionnels. Combien de morts au cours de ces quatre années sans que les familles ne puissent obtenir une reconnaissance officielle des causes du décès et une indemnisation ?

Manifestement, dans ce pays, il y a bien « deux poids de mesure ».

Certaines victimes méritent moins la reconnaissance de la Société que d’autres ?

Quelle est leur faute ?

Simplement d’avoir perdu leur santé au travail pour produire plus de richesse nationale ?

Et que dire de la sous-déclaration des maladies professionnelles depuis des années, si ce n’est qu’on laisse le sujet dans l’inaction la plus totale.

La branche maladie du régime général bénéficie chaque année depuis 1997, d’un versement d’un milliard de la branche AT-MP, 

L’assurance maladie supporte des dépenses liées à des accidents ou à des affections dont l’origine est professionnelle, mais qui n’ont pas été déclarés comme tels. En compensation des sommes indûment mises à sa charge du fait de cette sous-déclaration ; la branche maladie du régime général bénéficie chaque année depuis 1997, d’un versement d’un milliard de la branche AT-MP, qui brouille ainsi les comptes.

En effet, une commission présidée par un magistrat à la Cour des comptes est chargée d’évaluer, tous les trois ans, le coût réel de la sous-déclaration des AT-MP dans un rapport remis au Parlement et au Gouvernement.

Le dernier rapport de la commission d’évaluation, a été rendu en juin 2017 et une nouvelle commission aurait donc dû se réunir au printemps 2020 pour réévaluer le coût de cette sous-déclaration.

Or, le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021, prenant prétexte que ses travaux n’avaient pas pu être menés jusqu’à leur terme en raison de la crise sanitaire due à l’épidémie de covid-19 a décidé que ce rapport ne pourra être présenté par la Commission que le 1er juillet 2021.

Voilà comment se perdre habilement dans la connaissance de la sous-déclaration des maladies professionnelles et la compensation des sommes qui auraient dû être versées au bénéfice de la branche maladie pourtant largement déficitaire.

En conséquence, le montant du versement à l’assurance maladie correspondant à cette sous-déclaration est resté inchangé pour la septième année consécutive.

La FNATH s’alarme d’un auto-satisfecit donné aux résultats médiocres de la lutte contre les accidents du travail et les maladies professionnelles

La FNATH s’alarme d’un auto-satisfecit donné aux résultats médiocres de la lutte contre les accidents du travail et les maladies professionnelles, lequel est relayé par une « survalorisation » de la prévention permettant d’éviter d’informer l’opinion publique de cette réalité, et de faire l’économie du débat pour une amélioration de la réparation des victimes du travail (seules victimes encore en France à ne pas avoir droit à une réparation intégrale de leurs préjudices comme toutes les autres).

La FNATH dénonce un système de reconnaissance et une volonté du Gouvernement de taire la réalité de la sinistralité des accidents du travail et des maladies professionnelles, y compris en privant les victimes et leurs familles de toute indemnisation.

La FNATH dénonce, en outre, l’absence de toute politique pénale sérieuse et efficace, propre à lutter contre la criminalité en matière d’hygiène et de sécurité au travail.

En cette Journée mondiale de la sécurité et de la santé au travail, la FNATH exprime ainsi sa colère et appelle le Gouvernement à changer radicalement sa politique de mépris à l’égard des victimes et de leurs familles.