Arrêtons de réagir à chaque scandale en mettant en place un fonds d’indemnisation ou un dispositif ad hoc : créons enfin un véritable fonds ouvert à toutes les victimes d’effets indésirables graves de médicaments !
Nous nous réjouissons des annonces faites sur l’indemnisation des victimes de la Dépakine®. Nous serons extrêmement vigilants quant au suivi de ces annonces et à leur mise en application concrète, car pour les nombreuses victimes du Mediator®, l’indemnisation n’a pas été à la hauteur de leurs préjudices.
Nous regrettons qu’au fil des années les gouvernements abordent la question de l’indemnisation des victimes de médicaments au gré des scandales sanitaires et de la pression médiatique. A chaque crise particulière, notre société tente, au mieux, d’apporter une réponse spécifique, au pire, de l’oublier.
Ce traitement sans cohérence des drames sanitaires conduit à une injustice et à une discrimination majeure. La sur-médiatisation de certaines affaires est à la mesure du silence que les autres victimes doivent supporter. On ne peut accepter le déni actuel à l’endroit, entre autres, des victimes du Distilbène®, alors que cette histoire exemplaire est aujourd’hui enseignée comme « modèle » des erreurs à ne pas commettre.
Mettant régulièrement en lumière les dysfonctionnements des dispositifs d’alerte de pharmaco-vigilance, les victimes d’accidents médicamenteux sont, de plus, maltraitées par notre système juridique. Les règles actuelles de la responsabilité les conduisent le plus souvent dans une impasse et l’action de groupe votée en janvier dernier ne changera pas cette situation.
Collectif regroupant plusieurs associations de victimes, collectifs inter-associatifs et juristes spécialisés en droit médical, nous avons proposé, lors de la discussion de la dernière loi de santé, un projet de fonds d’indemnisation ouvert à toutes les victimes d’effets indésirables graves de médicaments.
La mutualisation d’un risque collectif, grâce à une taxe minime sur le prix de vente des médicaments, présenterait un double avantage : garantir aux victimes une indemnisation rapide, mais aussi, inciter les entreprises du médicament à promouvoir une politique efficace de transparence, de prévention, d’information, de responsabilisation vis-à-vis des produits qu’elles fabriquent et commercialisent.
L’Oniam aurait la gouvernance de ce fonds ; un tel dispositif, qui pourrait être voté dans l’un des textes budgétaires de l’automne, s’insérerait sans difficulté dans le droit existant sans contredire la directive européenne en vigueur.
L’industrie pharmaceutique, comme en son temps l’industrie automobile, mais aussi les victimes du médicament, comme les victimes de la route il y a 30 ans, ont, aujourd’hui, besoin d’une loi Badinter !
Il manque une seule chose pour qu’un tel fonds existe : une volonté politique.